Quand Joseph Meister fut sauvé par Pasteur

roman de Lorris MURAIL

Mieux valait la mort brutale que l'horrible agonie de la rage.

Scrinéo, 2016, 151 p. (Il était un jour)
Scrinéo, 2016, 151 p. (Il était un jour)

Joseph Meister, jeune Alsacien de dix ans à peine, est attaqué par un chien. Nous sommes en 1885. En cette fin de 19e siècle, la rage fait peur. Les cas ne sont pas très nombreux, mais une fois déclarée, la maladie est sans remède.

 

Affolée, la mère du garçon décide de l’emmener à Paris, ayant entendu parler d’un certain chimiste qui fait des expériences sur les animaux malades de la rage. Non sans mal, elle parvient à dénicher ce Louis Pasteur là où il poursuit ses recherches, à l’Ecole normale supérieure de la rue d’Ulm. Le savant se montre hésitant, réticent. Constatant la gravité des morsures, deux médecins de son entourage vont le convaincre de tenter pour la première fois d’appliquer son extravagante méthode sur un être humain...

L'avis de Catherine, prof doc :

Même si l'on connaît déjà l'issue, on se passionne vite pour comprendre comment tout cela s'est passé. Le roman est un récit un peu à la façon d'un docu-fiction: les personnages sont mis en scène et par moment on a l'impression que le narrateur intervient pour préciser des éléments, des faits, des données. Tout cela est très habile et subtile au cœur d'un roman au style agréable et très abordable pour nos jeunes lecteurs. L'auteur parvient à donner beaucoup d'humanité à ce scientifique.

 

Le point de vue est orienté principalement sur le jeune Joseph. Le contexte historique est clairement précisé ce qui permet de mieux cerner l'époque et les réactions des divers personnages. On découvre la personnalité et la sensibilité de Pasteur. On apprend également à quel point la peste était un fléau sur l'Europe entière et comment très vite, la rumeur se répand que Pasteur a trouvé un remède. Les gens accourent de loin pour espérer être sauvés.

L'exposé scientifique autour des maladies, des recherches et des avancées est fait dans une langue simple et toujours inclus dans le récit, impliquant les personnages.

 

A la fin de l'ouvrage, un dossier documentaire de presque 50 pages présente l'oeuvre plus générale de Pasteur. Cet ouvrage est donc complet et très intéressant. Roman historique mais aussi dossier documentaire en complément pour qui souhaite davantage d'informations. 

Novembre 2016

 

Mon avis :

Louis Pasteur par le photographe Félix Nadar (1878)
Louis Pasteur par le photographe Félix Nadar (1878)

Une très bonne entrée en matière aux travaux de Pasteur. L'auteur explique bien le contexte dans lequel l'épisode a eu lieu et la réussite de l'entreprise n'en est que plus impressionnante ! Il y a tout d'abord un concours de circonstances faisant que le petit Joseph (atteint de quatorze morsures !) a pu entrer en contact avec le scientifique (les voyageurs de l'auberge qui ont lu un article sur ce dernier, le fait que Mme Meister connaisse bien Paris, que Pasteur apprécie l'Alsace...). La ténacité d'une mère à sauver son fils coûte que coûte est également déterminante : le chimiste est à l'époque très mal perçu par le monde hospitalier qui fait obstacle à ses conclusions. Car Pasteur secoue les acquis des médecins (notamment concernant l'asepsie, les règles élémentaires d'hygiène), bouscule les méthodes et les mentalités, s'attirant de nombreux ennemis parmi les soignants. On comprend alors sa réticence à faire de Joseph son cobaye - le premier qui ne soit pas un animal.

 

Si Pasteur est exigeant et travailleur, il n'en est pas moins humain. Se liant d'amitié avec le garçonnet, il va lui expliquer la teneur du soin prodigué : profiter de la longue incubation de la rage pour inoculer chaque jour une version atténuée du virus, en vue d'accoutumer progressivement l'organisme - ce qui constitue le principe du vaccin. Il lui raconte l'épisode personnel qui l'a amené à étudier cette maladie, ses expériences sur les animaux et surtout, le doute qui l'habite constamment ("Ils savaient quels risques ils prenaient. Alors, ce revolver n'était pas forcément fait pour les chiens").

 

Le texte évoque aussi l'après Meister, autrement dit les conséquences immédiates et à plus long terme de cette réussite, comme la fondation de l'Institut Pasteur et le prolongement de ses travaux par les générations suivantes de scientifiques. L'ouvrage se clôt sur un dossier, "L'oeuvre de Pasteur", qui résume les grandes avancées qu'il a réalisées à partir d'une méthode toute personnelle consistant à partir de problèmes concrets (par exemple, c'est en étudiant la maladie du vin qu'il a mis au point la fameuse pasteurisation). L'ensemble relève davantage du documentaire que du récit et les concepts scientifiques un peu complexes peuvent rebuter. Il est également dommage que l'auteur n'ait pas fourni ses sources (néanmoins les documents iconographiques proviennent tous de la partie musée de l'Institut Pasteur) et/ou une brève bibliographie qui aurait permis au lecteur de prolonger son exploration du célèbre chimiste.

Patricia Deschamps, août 2017

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