La fille du papillon

roman d'Anne MULPAS

Mes doigts pianotent sur l'infini.

Livre de Poche Jeunesse, 2016 (pour cette édition), 204 p.
Livre de Poche Jeunesse, 2016 (pour cette édition), 204 p.

 

Solveig, 16 ans, a décidé de débuter un journal intime. Mais attention : le girly, ce n'est pas son style! Alors pourquoi s'y mettre ?

 

Entre autres, à cause d'un garçon si spécial qu'elle l'a surnommé "le Monde" ; de son père, veuf et volage - papillon, donc ; de la relation très forte avec Manon sa meilleure amie. Elle raconte aussi la douleur depuis la mort de sa mère.

 

Autant d'hésitations et de contradictions adolescentes qu'elle livre entre fantaisie et amertume.

Mon avis :

Initialement publié par Sarbacane (en 2006) dans la collection Exprim', ce livre n'est pas un journal intime comme les autres ! D'emblée le style, très poétique, charme. Loin des "boîtes à clichés", Solveig livre ses états d'âme en toute liberté, jouant avec les mots, les sonorités et la typographie pour mieux transmettre son humeur du moment. Élève en 1ère L, elle aime les références littéraires et écrit ses propres poèmes en prose, se livrant à cœur ouvert, à fleur de peau. Ses portraits sont vivants, évocateurs : son père le papillon ("Il virevolte de la table à l'évier, du frigo au fourneau. Comme avec les femmes"); sa mamie "le petit roseau" ("elle se voûte, se tasse, mais résiste au temps"); le Monde, petit-fils de libraire, amoureux des mots comme elle, "une balise en pleine mer" avec qui "tout est neuf"; sans oublier Manon, "La Ni, Ninon la douce, mon oiseau léger. Je pourrais lui faire des déclarations d'amour à volonté, mais je me tiens dans le non-dit. Elle sait, je sais". Pourtant, malgré cet entourage réconfortant, il y a ce journal.

 

Si c'est l'amour qui a poussé Solveig à l'entamer ("tout ce qui m'entoure s'est auréolé d'un film d'or"), on sent bien que l'écriture sert avant tout à embellir la réalité, ou tout au moins à aider à la supporter : "Tout ça, c'est la poésie. Ensuite, y a le réel". Le réel, c'est "toute la peine que j'avais de la mort de Maman". Surtout qu'un "grain de sable" fait son apparition, rapporté par son père : une "amie", "Elle", belle, douce, drôle. Va-t-elle prendre la place de Maman à la maison ? Pire : faire oublier Maman ? "Les mères mortes ou vives ont tout pouvoir sur nos destins". Et puis l'adolescente envisage sa "première fois" avec le Monde mais cela l'angoisse : "tout me semble compliqué, et je ne sais pas à qui en parler". Dès lors tout s'enraye, Solveig commence à jouer les "petites filles gâtées" et se met à "faire n'importe quoi" avec sa copine, ce qui éloigne son amoureux et fâche son père. Cette partie-là est moins attrayante, plus convenue, heureusement sauvée par cet inimitable style. Passage initiatique incontournable, il aboutira à une maturité, une sérénité nouvelles : "Je n'ai plus peur de demain. Enfin, plus trop".

Patricia Deschamps, avril 2017

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