Gustave Eiffel et les âmes de fer

roman de Flore VESCO

Nous recrutons de jeunes esprits scientifiques, et les formons à devenir des savanturiers : des combattants-chercheurs, à l'aise aussi bien dans un laboratoire que sur le champ de bataille.

Didier jeunesse, 2018, 224 p.
Didier jeunesse, 2018, 224 p.

"Société très fermée recherche esprits logiques et cœurs aventureux." À la lecture de cette étrange petite annonce, Gustave Eiffel, ingénieur fraîchement diplômé, tente sa chance. Le voici recruté par la S.S.S.S.S.S. : la Société Super Secrète des Savants en Sciences Surnaturelles, en charge de la protection du pays contre les créatures fantastiques.

 

Après une formation musclée au combat, il rejoint une usine de métallurgie en tant que contremaître pour mener discrètement sa première enquête. On soupçonne en effet la présence d’un dangereux phénix, qui pourrait renaître de ses cendres et incendier la ville. Mais entre des ouvriers peu loquaces et un patron mystérieux, Gustave devra ruser pour découvrir la terrible vérité…

 

Mon avis :

Une mise en scène très drôle de génies de la science, cependant je n'ai pas réussi à accrocher à cette aventure de la révolution industrielle.

Dans la première partie, on fait la connaissance du jeune Gustave Eiffel tandis qu'il passe les sélections ultra pointues de la Société Super Secrète des Savants en Sciences Surnaturelles organisées par Louis Pasteur alias l'agent spécial π spécialité "vaccination des créatures métamorphes", puis la formation au combat non moins exigeante de Constance devenue l'agent spécial ≥ (tous deux héros du roman précédent, Louis Pasteur contre les loups-garous). Même s'il y a des touches d'humour (j'ai beaucoup aimé le personnage d'Alfred Nobel jouant à manipuler la nitroglycérine, et celui de Galvani(er), connu pour ses expériences électriques sur des grenouilles, en barjot aux neurones grillés !), j'ai trouvé ce début peu original. Gustave est un garçon "observateur, sensible, doté d'une excellente mémoire" mais il manque de confiance en lui - ressort souvent utilisé pour rendre le protagoniste plus attachant. Il enchaîne les échecs et le passage est un peu long.

 

Ensuite démarre sa mission au sein de la manufacture d'acier. On plonge alors en pleine ère industrielle, à cette époque où la machine à vapeur est reine, même si "la fée électricité" pointe son nez. Dans cette usine de fabrication automatisée de pièces métalliques, Gustave Eiffel découvre les conditions de travail déplorables des "manœuvres", entre chaleur, rythme effréné, bruit et insécurité ("Cet endroit mettait les nerfs à vif"). Les hommes sont "usés et indifférents", les enfants réquisitionnés, l'unique femme sous-payée. Le générateur central est même comparé à une "bête" comme dans un Zola. Ainsi le roman prend une tournure historique un peu déconcertante, l'humour se cantonne à des "calembours foireux" et on se perd souvent dans les explications techniques de notre génie scientifique qui utilise systématiquement ses connaissances pour se sortir des situations les plus alambiquées.

 

L'intrigue se double d'une enquête sur la disparition mystérieuse d'ouvriers, et sur la toute fin, de surnaturel avec "l'ombre malfaisante" et le fameux phénix que l'on avait perdu de vue. La théorie, très pertinente, des "hommes de fer", rejoint la science-fiction puisqu'il est question de sortes d'hommes-machines ou d'androïdes avant l'heure. Cette partie-ci regorge d'action, un peu trop peut-être, parce que j'ai aussi ressenti un mélange de déjà-vu et de lassitude malgré le choix du thème. Le dénouement est résolument fantastique, et l'auteur imagine une autre origine, "ébouriffante", à la fameuse tour Eiffel.

Ainsi il y a objectivement de bons ingrédients dans ce roman richement documenté et pensé, pourtant le résultat n'a pas su me capter.

Patricia Deschamps, avril 2019


 

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