Émergence 7

roman de Vincent MONDIOT illustré par Enora SABY

Quelques heures d'horreur ont effacé de ma mémoire des années de bonheur.

Actes Sud jeunesse, 2022, 208 p.
Actes Sud jeunesse, 2022, 208 p.

Déménager, c’est toujours dire adieu à une partie de son passé. Léon en a bien conscience, ce matin-là, alors qu’il attend le bateau qui l’emmène au collège. Bientôt, il va devoir quitter la petite île bretonne sur laquelle il a toujours vécu. Comment l’annoncer à Joachim, son meilleur ami, ou à Alex, la fille dont il est amoureux ? Mais tout ça n’a plus d’importance quand soudain une créature gigantesque et mystérieuse émerge de l’océan pour semer derrière elle la mort et la destruction. Vingt ans plus tard, devenu adulte, Léon revient sur les lieux du drame. Et il se souvient de ce qui a été, de ce qui ne sera plus.

(4e de couverture)

Mon avis :

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Un récit apocalyptique raconté vingt ans après par l'un des survivants.

Léon avait quatorze ans quand le drame est arrivé. Le début de son récit est intrigant et plein de tension: revenu sur les lieux à l'occasion d'une commémoration, on le sent encore bouleversé par les événements ("vingt ans de cauchemars récurrents") sans que l'on sache de quoi il retourne.

 

Ils étaient sept sur le quai de leur île bretonne, ce matin-là, à attendre le bateau devant les mener au collège. J'ai trouvé les personnages bien caractérisés: il y a Joachim, le meilleur ami de Léon, et tous ses TOC ("Il fonctionne comme ça. C'est pas grave."); sa grande sœur très vulgaire, Romane; Nina la (mini) mascotte de la bande; Elliott la brute; Priscille la méprisante et Alex "la fille que j'aimais", rockeuse solitaire dotée d'un "sens de la répartie assez prodigieux".

Et voilà que surgit une "créature gigantesque", un "monstre colossal" qui détruit tout sur son passage, semant le chaos et la mort (il sera baptisé Tess par l'armée). On plonge alors dans une situation cauchemardesque dont tous les amis ne sortiront pas vivants.

 

Les illustrations se mêlent au texte en une mise en page dynamique nous immergeant dans l'histoire. Les pages colorées sont du plus bel effet, elles indiquent aussi parfois les changements de temps du récit. Néanmoins ces derniers, nombreux, peuvent perturber le jeune lecteur, d'autant qu'il ne s'agit pas d'un simple passé-présent: aux scènes du drame s'insèrent parfois des retours en arrière antérieurs encore à celui-ci. Il faut alors se fier aux couleurs vives, seule indication du changement d'époque (la typographie reste similaire).

J'ai par ailleurs regretté la profusion de gros mots sortant de la bouche de Romane. Les descriptions de blessures peuvent aussi heurter les âmes sensibles.

 

On ne sait pas réellement ce qu'est le monstre. Représente-t-il un symbole? Certaines phrases évoquent un message écologique ("Huit monstres géants étaient apparus autour du globe. Les Émergences. Le monde venait d'être obligé de changer.") mais rien d'évident.

Sur la fin j'ai trouvé le personnage de Léon (l'actuel) un peu pesant: vingt ans ont passé et il est pourtant toujours en plein deuil. Et en même temps, on réalise comment un drame peut brutalement stopper une vie, celle de ceux qui ont succombé mais aussi celle de ceux qui ont survécu. Le texte insiste aussi sur la nécessité de revenir sur les lieux et de revoir certaines personnes pour enfin avancer: "Maintenant je dois décider de mon avenir. Dépression à vie, ou passer à la suite".

Patricia Deschamps, janvier 2024


 

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