No et moi

roman de Delphine de VIGAN

Lattès, 2007, 285 p.
Lattès, 2007, 285 p.

Quand le prof de SES impose à ses élèves de Seconde de faire un exposé oral, Lou est paniquée. Elle a beau être surdouée, elle n’en a pas moins peur de s’exprimer devant les autres. Prise au dépourvu, Lou annonce qu’elle va « faire un truc sur les sans-abri ».

Là voilà donc dans la rue à la recherche d’une jeune femme qui accepterait d’être interviewée… Elle se rend compte rapidement qu’il n’est pas facile de s’immiscer dans ce milieu particulier où les gens sont blessés par la vie et déconnectés de la société. C’est finalement No(lwenn) qui, à seulement dix-huit ans, va lui entrouvrir les portes de son quotidien de SDF.

Mon avis :

No est un peu sauvage et Lou va devoir l’apprivoiser. Mais au fur et à mesure que se construit une amitié entre elles, c’est autant l’héroïne que sa compagne que l’on découvre.

 

Lou est une adolescente aussi brillante que sensible, qui a elle aussi connu un drame familial l’ayant plongé dans le désarroi et la solitude (« Certains soirs je n’ai pas envie de rentrer chez moi, à cause de toute cette tristesse qui colle aux murs »). C’est peut-être pour cela que les deux filles se rapprochent. Lou s’inquiète pour No, mais aussi pour son camarade Lucas dont la mère n’est quasiment jamais là (« Comment peut-il vivre seul dans un si grand appartement ? »). Lou ne comprend pas comment on peut être aussi avancé scientifiquement et technologiquement, et pourtant laisser des gens livrés à eux-mêmes. Laisser des gens vivre au bord du périphérique parisien et même mourir dans la rue. Lou voudrait aider.

 

Qu’est-ce qui fait que les choses, un jour, basculent ? Qu’est-ce qui fait qu’un jour « voilà ce qu’on devient, des bêtes, des putains de bêtes » ? Ce qui m’a le plus marqué dans les paroles de No, c’est le fait que sa vie se résume aux « heures passées à attendre », à « tuer le temps », tandis que nous avons toujours le sentiment d’en manquer... En réalité, « il n’y a rien devant elle, aucun projet, aucun chemin, aucune issue », et c’est bien triste…

 

Néanmoins j’ai trouvé que c’était Lou la plus touchante. Lou est persuadée que « les choses peuvent être autrement même si c’est très compliqué ». Et comme de fait, ce sera compliqué de sauver No… Quand Lou réalisera que « quelque chose ne tournait pas rond [dans le monde]. Il suffisait de regarder autour de soi », et que malgré sa bonne volonté, elle n’y pouvait pas grand-chose, un déclic se fera en elle (« Quelque chose venait de m’arriver qui m’avait fait grandir »). Ce n’est pas ce qu’elle espérait, néanmoins elle n’a plus peur. Et comme l’encourage son prof de SES : « Ne renoncez pas », car de belles choses peuvent aussi arriver.

 

Patricia Deschamps, décembre 2023



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