Lucky losers

Laurent MALOT

Albin Michel Jeunesse, 2017, 297 p.
Albin Michel Jeunesse, 2017, 297 p.

 

"Sean Kinsley, dix-sept ans, c'est moi. Il y a moins d'un an, je vivais encore à Londres, jusqu'à ce que ma mère surprenne mon père dans les bras d'un homme. C'est là que tout a basculé : déménagement en Bretagne, inscription dans un nouveau lycée, mais surtout coup de foudre pour la plus belle fille du monde ! C'aurait pu être le nirvana si des fils à papa n'avaient pas cherché à nous humilier, mes copains et moi. Et comme je ne réfléchis pas toujours aux conséquences, je leur ai lancé un défi. De quelle façon ce défi a pu embraser tout Douarnenez, je me le demande encore..."

Mon avis :

Quand un défi sportif devient le symbole de la lutte des classes.

Sean, comme ses camarades du lycée Saint-Hilaire, vit dans des conditions familiales délicates : divorce, chômage, logement modeste (voire foyer pour Antoine) et fins de mois difficiles. Tous se passeraient bien des insultes des bourges de l'institut privé Balzac, "fils à papa" possédant les entreprises locales où travaillent leurs parents "prolos". Mais voilà : Sean a le coup de foudre pour Camille, l'héritière des Ateliers d'Arincourt, et dans cette petite ville bretonne, l'amour "d'une princesse et d'un roturier" est inconcevable. Pour autant, pas question de "se coucher devant les bourges" : en lançant un défi à ses détracteurs dans leurs sports de prédilection, Sean devient celui qui relève la tête devant les bourgeois : "On était nuls mais prêts à se battre". Question de dignité.

 

Or, on annonce des licenciements dans les principales entreprises de la ville... Dès lors, ce qui était une simple provocation prend des proportions insoupçonnées : les ouvriers qui manifestent sont rejoints par des lycéens tout aussi haineux des humiliations subies : "Ce défi est la parabole de ce qu'ils vivent tous les jours, la lutte des faibles contre les puissants". Tandis qu'il voit son père musicien dépérir et qu'il combat son "complexe d'infériorité" en compagnie de Camille, Sean constate que sa popularité ne cesse de grimper, grâce notamment à Sarah, jeune journaliste en herbe. Une solidarité qui l'aide à ne pas se décourager lors des entraînements calamiteux de ses camarades ! En devenant "le grain de sable dans la machine à broyer du salarié", l'adolescent fédère le sentiment d'injustice sociale de sa classe : "L'essentiel était qu'on soit de nouveau unis".

 

Si l'happy end n'est pas vraiment plausible, le roman apporte des conclusions tout à fait pertinentes. D'une part, "les bourges d'un côté, les prolos de l'autre, la réalité était plus subtile"... Tout n'est pas si tranché comme en témoignent les actes de soutien d'Eléonore d'Arincourt, la mère de Camille. D'autre part, Kévin, Antoine et Rémy ont fait preuve d'un courage admirable lors des épreuves, démontrant "la victoire de l'abnégation et du dépassement de soi". Ainsi les quatre amis ont le sentiment d'avoir vécu ensemble une "grande aventure" et surtout, "malgré les difficultés, on avait su rester une équipe".

Un roman qui sensibilise à une question de société majeure tout en encourageant des valeurs de solidarité et de combativité face à l'adversité !

Septembre 2017

L'avis de Michaël, en 1ère :

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