Le meurtre de Roger Ackroyd

Ah, l'argent ! Qu'on en ait ou qu'on en manque, c'est toujours lui la cause du mal.

Le livre de poche jeunesse, 2007, 380 p.
Le livre de poche jeunesse, 2007, 380 p.

 

Cela fait tout juste un an que le mari de Mrs Ferrars est mort. D'une gastrite aiguë. Enfin, c'est ce qu'il semble. Après tout, les symptômes de l'empoisonnement par l'arsenic sont presque les mêmes... Hier, Mrs Ferrars est morte à son tour. Une trop forte dose de véronal. Suicide ? Allons donc ! Elle était encore jeune et très riche...

 

Et puis aujourd'hui, Roger Ackroyd, le riche gentleman qui devait épouser Mrs Ferrars, a été assassiné. Cette fois, le doute n'est pas permis. Mais pourquoi?, se demande Hercule Poirot. C'est qu'ils sont plusieurs - domestiques, famille, voisins - à avoir une bonne raison de souhaiter la mort d'Ackroyd...

Mon avis :

Quel régal de relire, vingt ans après, cet incontournable d"Agatha Christie étudié en licence de lettres ! L'écriture, les portraits psychologiques, les mobiles, tout reste étonnamment moderne et toujours aussi fluide à lire ! Et le fait de connaître le coupable, dans cette enquête aussi atypique que Dix petits nègres et Le crime de l'Orient-Express, fait envisager la lecture sous un autre angle, tout aussi passionnant.

 

Le Dr Sheppard, narrateur de ce récit, commence par la description de sa soeur Caroline dont la sagacité ne va pas sans rappeler celle de Miss Marple : "Elle trouve sans bouger de chez elle ni faire le moindre effort", facilitée en cela par la distraction favorite des habitants de King's Abbot, "cancaner". Grâce à "ce flair infaillible qui lui permet de se faire une opinion immédiate", Caroline est traversée de "déductions fulgurantes" et se montrera une alliée de talent pour le célèbre Hercule Poirot.

 

"Mr Porrot", comme l'appellent au départ ses voisins, est présenté sous un jour particulièrement ridicule ! On le croit "coiffeur à la retraite, il n'y a qu'à voir sa moustache", il est décrit avec "un crâne en forme d’œuf" et "un accent à couper au couteau" et son activité préférée est "la culture de courges" !.. Une chose est sûre, c'est que sa haute opinion de lui-même ("Je suis génial en psychologie") le rend désagréable, et quand il joue les prétentieux ("Il bomba le torse"), "il frise le ridicule", se montrant sous un jour "grotesque" malgré l'efficacité indéniable de ses "petites cellules grises"... et sa capacité à "river son clou à Caroline" !

 

L'enquête est "un vrai casse-tête". Les pistes sont multiples, chacun des nombreux suspects ayant quelque chose à cacher. Mais ce qui m'a amusée à cette seconde lecture, c'est de repérer tous les petits indices qui vont mener Hercule Poirot au coupable et les allusions glissées par l'auteur concernant le double jeu de ce dernier:"J'ai acquis l'art de ne pas me compromettre". Entraîné malgré lui dans l'investigation, le meurtrier s'efforce de ne pas se trahir dans ses actes comme dans ses paroles : "Je fis un compte-rendu légèrement transposé". Certaines répliques et situations sont même très drôles quand on lit en sachant le fin mot de l'histoire !

 

Comme dans toutes les enquêtes d'Hercule Poirot, celui-ci sera donné au cours d'une petite mise en scène dont le détective se délecte ("Je dois préparer la scène pour ma petite... représentation") tout autant que le lecteur. Remontant le fil de ses déductions, Poirot expose avec clarté ce qui, pour n'importe qui d'autre, constitue un véritable écheveau : "Tout était déjà clair dans son esprit". Quant à ce qu'il advient au coupable... disons que la boucle est bouclée !

 

Patricia Deschamps, octobre 2017

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