Le mari de mon frère, tome 1

manga de Gengoroh TAGAME

Akata, 2016, 180 p.
Akata, 2016, 180 p.

Yaichi élève seul sa fille Kana.
Mais un jour, son quotidien va être perturbé...
Perturbé par l'arrivée de Mike Flanagan dans sa vie. Ce Canadien n'est autre que le mari de son frère jumeau qu'il n'a jamais revu depuis son départ dix ans auparavant ! Suite au décès de ce dernier, Mike est venu au Japon, pour y réaliser un voyage identitaire dans la patrie de l'homme qu'il aimait. Yaichi n'a alors d'autre choix que d'accueillir chez lui ce beau-frère homosexuel, vis-à-vis de qui il ne sait pas comment se comporter.

 

Texte : 4e de couverture

Mon avis :

Assez peu de paroles dans ce manga original qui aborde l'homosexualité avec pudeur mais sincérité : tout est axé sur le ressenti, dans un huis clos réflexif tout en émotion. D'un côté le père, Yaichi, se bat intérieurement contre ses préjugés ("c'est parce que le conjoint de mon frère est un homme que je suis mal à l'aise"). De l'autre sa petite fille espiègle, Kana, livre ses pensées avec toute la franchise et la fraîcheur de son jeune âge. Entre les deux, le colossal mais flegmatique Mike, cherche sa place sans l'imposer.

Au départ, déstabilisé par "ce beau-frère que je rencontre pour la première fois de ma vie", Yaichi fait bonne figure mais n'en pense pas moins : "sale homo, lâche-moi!", "c'est étrange que deux hommes puissent s'épouser", "bien sûr que ça me dérange" s'affichent dans une moitié de vignette tandis que l'autre exprime une politesse de façade. Mais cet "énorme étranger" est un homme sensible au grand cœur et Kana ne s'y trompe pas : "j'l'adore", "mon tonton canadien" ! N'ayant pas la langue dans sa poche, elle n'hésite pas à poser les questions qui la turlupinent ("On peut se marier, quand on est deux hommes, au Canada ?", "Mais qui fait l'homme, qui fait la femme ?"), faisant réaliser à son père son manque de tolérance : "Kana a raison. Je ne peux pas juger car jusqu'à aujourd'hui je n'y connaissais rien".

 

Deuxième difficulté pour Yaichi : Mike le replonge dans les (bons) souvenirs de son jumeau Ryôji avec qui il avait perdu contact depuis des années. Pourquoi ? se demande-t-on. Qu'est-ce qui fait que "une fois adultes, on a perdu cette relation si unique qui nous liait" ? Cet éloignement n'est-il pas né justement le jour où Ryôji a annoncé son homosexualité ? "Je n'avais aucune idée de comment je devais réagir", avoue Yaichi. Depuis "une sorte de malaise" s'était installé et les deux frères avaient "évité les discussions à ce sujet".

Si au final Yaichi continue de présenter Mike comme "un ami de mon frère", on sent que son point de vue s'est ébranlé tandis qu'il parcourt la ville sur les traces de ces "endroits qui ont marqué sa vie". On sent que ces deux-là ont beaucoup à s'apporter et Kana ne s'y est pas trompée, elle qui a déjà développé une complicité avec le Canadien. D'ailleurs le tome se termine sur une belle surprise pour elle !

A noter : entre deux chapitres, Mike nous gratifie d'une "petite leçon de culture gay", l'une sur le mariage homosexuel dans le monde, l'autre sur la symbolique du triangle rose.

Patricia Deschamps, mai 2017

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Le mari de mon frère, tome 2

Les enfants ont bien de la chance de ne pas se prendre la tête pour des détails inutiles.

Akata, 2016, 176 p.
Akata, 2016, 176 p.

 

Déjà comblée par un papa aimant et un tonton tout droit venu du Canada, la petite Kana se réjouit d'avoir pour quelques jours sa maman à la maison. Divorcés, ses parents s'entendent très bien même s'ils ont dû passer par des moments plus difficiles.

 

Yaichi, le papa de Kana, se pose encore quelques questions quant à l'homosexualité de Mike, le mari de son frère jumeau. Mais il revoit ses convictions, notamment au vu des réactions quelque peu ridicules du voisinage

 

Texte : marina53 pour Babelio

Mon avis :

Maintenant que Yaichi a accepté l'homosexualité de son beau-frère, il se trouve confronté à la difficulté d'évoquer le sujet avec son entourage. Si lui est désormais convaincu que Mike est "un type bien", certain(e)s continuent de penser "qu'il n'y a qu'un seul modèle de famille correct et que tous les autres sont à plaindre". C'est le cas de la mère de Yuki, la copine de Kana, qui évite Yaichi depuis que Mike habite chez lui et refuse que sa fille vienne chez eux à cause de la "mauvaise influence" du tonton. Cependant Yaichi se sent "mal placé pour donner des leçons", vu qu'il lui a fallu du temps pour accepter les faits.

 

Les Japonais sont des gens très pudiques, ce qui ne facilite pas les choses... Yaichi lui-même a du mal à se montrer démonstratif avec sa fille, alors que Mike prodigue des "hug" sans problème ("Nous les Japonais, on fait pas ça !"). La fillette semble en souffrir, tout comme son père qui la voit si proche et complice du Canadien. Il se dégage de celui-ci une sorte de sérénité et de bienveillance qui encouragent le rapprochement. Le jeune Kazuya ne s'y trompe pas en venant lui confier son lourd secret fait de peur et de honte mêlées.

 

Tous ces menus événements amènent Yaichi à de longues introspections (dans le bain ou sous la douche, y a-t-il un double sens au lavage ?) et on sent qu'il peine encore à se regarder dans le miroir (en face, donc)... La petite Kana, elle, est toujours aussi pleine de vie et spontanée, ce qui la rend attendrissante. Le contraste d'attitude avec son père est saisissant ! Ce sont en réalité deux façons distinctes d'aborder la situation...

Patricia Deschamps, avril 2018


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