L'heure zéro

roman d'Agatha CHRISTIE (1944)

Le Masque, 300 p.
Le Masque, 300 p.

 

Quelle drôle d'idée ! Rassembler pour des vacances à La Pointe-aux-Mouettes l'ex-Mrs Strange - Mrs Audrey depuis son divorce - et Kay, la nouvelle tenante du titre, sous le prétexte d'en faire des amies...

C'est de l'inconscience, pour ne pas dire plus. Car enfin, l'époux de ces dames, Neville Strange, n'a quand même pas la naïveté de croire qu'elles vont tomber dans les bras l'une de l'autre. Pour Mrs Tressilian et Mary Aldin, leurs hôtesses, tout comme pour les amis de passage, c'est un cocktail pour le moins explosif et qu'en aucun cas l'air marin ne devrait apaiser...

Mon avis :

L'originalité de ce roman, c'est qu'il défend la théorie selon laquelle "le meurtre n'est jamais que la fin de l'histoire", et que celle-ci "débute bien avant ça avec les mille et une causes et la longue suite d'événements qui font que des individus donnés sont présents un jour donné, à une heure donnée, dans un endroit donné", convergeant vers "l'heure zéro". Et pour exemple, le récit commence plusieurs mois avant les faits, nous présentant des personnages dont on n'a aucune idée du rôle: Mr Treves, célèbre vieil avocat passionné de criminologie et ses anecdotes; Angus MacWhirter et son suicide raté; ou encore le commissaire Battle et sa fille injustement accusée.

 

Et puis nous voilà à la Pointe-aux-Mouettes en plein triangle amoureux entre Neville Strange, son ex (Audrey) et sa nouvelle épouse (Kay). La maisonnée est divisée en clans, selon que l'on soutienne l'une ou l'autre femme (les amis d'enfance et anciens amoureux, Thomas Royde et Ted Latimer, sont là aussi...). J'avoue avoir trouvé que le meurtre tardait à venir, même si l'atmosphère est pleine de tension ("Quelque chose dans l'air. Comme une menace.") et que l'on se demande qui va être la victime. Mr Treves, invité de passage, ajoute un peu d'huile sur le feu.

 

Comme toujours avec Agatha Christie, le meurtre et l'enquête qui suit réservent bien des surprises. Non seulement "c'est un crime de famille" mais le commissaire Battle (les voilà qui entrent en scène peu à peu les personnages du début) a affaire à "un meurtre ingénieux, préparé avec soin et dans le moindre détail". J'ai aimé les petites allusions à Hercule Poirot (dont Battle souligne le souci des détails et la finesse psychologique), d'ailleurs l'épisode de la révélation finale n'est pas sans rappeler les mises en scène du détective belge ("On aurait dit un metteur en scène")... et prouve qu'effectivement, "la mécanique criminelle est en marche depuis bien longtemps" et que c'est l'enchaînement de plusieurs événements qui a conduit à sa résolution.

Patricia Deschamps, décembre 2021


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