Big easy

roman de Ruta SEPETYS

Les grandes décisions, voilà ce qui façonne notre destinée.

Gallimard, 2013, 446 p. (Scripto)
Gallimard, 2013, 446 p. (Scripto)

La Nouvelle-Orléans, 1950.

La mère de Josie est une prostituée alcoolique et violente travaillant dans une maison close du Quartier français. Alors la jeune fille préfère loger dans une chambre au-dessus de la librairie Marlowe où elle travaille avec le fils du propriétaire.

 

Car Josie a bien l'intention de fuir cette vi(ll)e sordide dès que possible. Passionnée de littérature, elle rêve de faire des études à l'université.

 

Mais voilà que le mafieux dont est amoureuse sa mère débarque dans le quartier. Quelques jours plus tard, un riche client de la librairie est retrouvé mort... et Josie découvre sa montre dans les affaires de sa mère !.. Qu'est-il véritablement arrivé à cet homme ?

Mon avis :

Une galerie de personnages savoureux tournant autour d'une héroïne vraiment attachante.

Jeune fille moderne et indépendante, Josie refuse le destin minable que tout le monde lui prédit dans le Quartier français. Non, elle ne suivra pas le chemin de sa mère, même si elle fait du ménage dans la maison close et bénéficie de la protection de sa tenancière, Willie. Grâce aux activités de ses "nièces", Willie est devenue une femme riche et influente... dans son petit cercle d'affaires uniquement. Pour elle, les "cacahuètes salées" ne fréquentent pas les "petits fours"... Mais Josie voit plus grand, plus loin, "obsédée par les quartiers chics et les chroniques mondaines". Elle rêve d'études universitaires, dans un établissement prestigieux, tout au nord du pays. En se liant d'amitié avec Charlotte l'étudiante, elle touche du doigt ce monde de riches qu'elle convoite. Monde doré qui révèle pourtant quelques grossières fissures...

Et surtout, Josie en a assez  d'être "montrée du doigt comme la fille d'une prostituée", d'être lorgnée pour ses vêtements défraîchis... Quelle humiliation ! Et s'inventer un prénom chic ("Josephine", comme dans Les quatre filles du Dr March), n'y changera rien. Alors elle se ressource dans la lecture, enrichissant en même temps ses connaissances. Avec son ami Patrick, le fils du libraire, la littérature devient un jeu et le récit est égrené de références (Dickens, Jane Austen, Fitzgerald...). Le pauvre a bien besoin qu'on lui change les idées, avec son père Charlie qui perd la tête... Dans le petit monde de Josie, il y a aussi Jesse le motard fleuriste au charme sauvage, et puis Cokie, le vieux chauffeur de Willie avec son accent typique : deux autres protecteurs constamment dans son sillage et qui l'encouragent à s'émanciper... même s'ils ne manquent pas de tenir Willie informée: dans le quartier, tout le monde sait tout sur tout le monde... Et c'est aussi à ça que veut échapper notre Josie si avide de liberté.

L'intrigue tourne autour de deux grandes thématiques : les manœuvres de l'héroïne pour s'inscrire à l'université, et le mystère autour de la mort de Forrest Hearne le gentleman. Pour l'université, Josie a besoin d'une lettre de recommandation et d'argent. Le tout est de les obtenir sans se pervertir... Quant au meurtre de Hearne, la jeune fille se sent concernée non seulement "parce que ce monsieur respectable s'était rendu compte que, loin d'être une bonne à rien, elle était une fille bien", et aussi parce que sa mère et son mafieux de compagnon semblent y être mêlés. Ils risquent de faire pression sur elle pour leur servir d'alibi... Or voilà longtemps que Josie ne se sent plus aucune affinité avec cette femme superficielle et dépravée, mère ignoble qui a envers elle des paroles et des actes si durs.

Un roman aux allures de polar dans l'ambiance Nouvelle-Orléans, qui nous embarque au fil des pages dans une écriture fluide et prenante. C'est avec regret que l'on quitte Josie !

Mars 2016


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