Sophie Germain est une mathématicienne du 19ème siècle, une pionnière qui s'est frayée un chemin dans le monde scientifique grâce à sa détermination et son culot. À treize ans, pour échapper à la tourmente révolutionnaire, Sophie Germain se réfugie dans les maths qu'elle apprend en cachette. En 1797, elle se fait passer pour Le Blanc, un étudiant, afin d'obtenir les cours de Polytechnique. Elle utilise le même pseudo pour correspondre avec les plus grands mathématiciens de son temps et en 1816 devient la première femme récompensée par l'Académie des sciences. Une success story ? Pas vraiment. Malgré son audace et son talent, Sophie Germain, la femme cachée des maths, retombera vite dans l'oubli. Il est temps pour elle d'entrer dans la lumière.
Mon avis :
L'histoire de Sophie Germain s'inscrit dans la lignée de toutes ces femmes scientifiques oubliées. Tout commence avec une jeune file bousculant les stéréotypes ("Elle déteste la broderie, le tricot et elle exècre tous les ouvrages pour dames en général."), n'aimant rien de mieux que les ouvrages de mathématiques qu'elle trouve dans la bibliothèque paternelle. Dès lors, les maths deviennent une obsession, et une forme d'apaisement "à ordonner le monde alors qu'autour d'elle tout est chaos".
Nous sommes en effet en pleine Révolution française (et son père est député du tiers-état). Je ne suis pas fan de cette époque, et les références historiques (y compris ultérieures) ne m'ont pas accrochée, mais l'autrice a une façon d'interpeler ses lecteurs ("Vous voilà aussi surpris que Sophie.") qui rend le récit dynamique.
C'est à Polytechnique que Sophie se fait remarquer. Elle n'est bien sûr pas admise à l'école (il faudra attendre 1972 pour que le concours d'entrée soit autorisé aux filles! "Soit près de deux siècles après sa création"...). Cependant elle sympathise avec un étudiant, Antoine Augustin Le Blanc, qui fait parvenir ses questionnements mathématiques aux enseignants. Interpelé par cet "esprit singulier, audacieux", le célèbre Lagrange demande à la rencontrer. Contre toute attente, il la conforte dans sa vocation.
Ce n'est pas pour autant que les hommes de science la considèrent comme des leurs. Sophie n'a que faire du "Newtonisme pour les dames" et autres ouvrages de science au rabais que l'on suggère aux "femmes savantes"! Elle est une scientifique et le prouvera avec différents travaux. Malheureusement, elle ne pourra jamais vivre de son immense talent. Et cette mathématicienne discrète sera vite oubliée par ses contemporains après sa mort... Ce qui n'empêchera pas certains de s'approprier ses conclusions dans leurs propres recherches (le fameux "effet Matilda" dont l'autrice donne plusieurs exemples).
Au moins Sophie aura-t-elle eu la possibilité, grâce à la rente de ses parents, de ne pas se marier: selon le Code Napoléon de 1804, une épouse est sous l'autorité de son mari et n'a aucune indépendance. Restée célibataire, Sophie Germain aura pu faire des maths toute sa vie "sans comptes à rendre"!
Patricia Deschamps, octobre 2025