Ma cousine Rachel

roman de Daphné du MAURIER

- Pars si tu veux, dis-je, mais pas tout de suite. Donne-moi encore quelques semaines à garder dans mon souvenir. Je ne suis pas un voyageur. Tu es pour moi le monde.

Livre de poche, 2002, 384 p.
Livre de poche, 2002, 384 p.

 

Philip, sans la connaître, déteste cette femme que son cousin Ambroise, avec lequel il a toujours vécu étroitement uni dans leur beau domaine de Cornouailles, a épousée soudainement pendant un séjour en Italie.

 

Quand Ambroise lui écrira qu'il soupçonne sa femme de vouloir l'empoisonner, Philip le croira d'emblée. Ambroise mort, il jure de le venger.

 

Sa cousine, cependant, n'a rien de la femme qu'imagine Philip. Il ne tarde pas à s'éprendre d'elle, à bâtir follement un plan d'avenir pour finir par buter sur une réalité de cauchemar.

(4e de couverture)

Mon avis :

Un jeune homme élevé dans "une maison d'hommes" face à une femme à l'attitude équivoque.

J'ai trouvé qu'il y avait moins de tension dans cette histoire que dans celles précédemment lues (Rebecca, Le bouc émissaire, La poupée), tout au moins au début, centré sur le deuil de Philip: certains passages m'ont semblé un peu longs, même si l'ambiance de son séjour en Italie sur les traces d'Ambroise est très évocatrice. La maison (si possible en bord de mer et agrémentée d'un grand jardin) comme havre de paix est un thème cher à Daphné du Maurier et la villa Sangalletti tout comme la propriété, très masculine, du héros en Cornouailles en sont encore de belles représentations.

 

C'est lorsque celui-ci rencontre enfin la fameuse "cousine Rachel" que l'intrigue décolle. L'épouse d'Ambroise est aux antipodes de l'image qu'il s'en faisait et tout le mystère repose sur sa personnalité qui semble ambiguë: son attitude est-elle sincère ou bien cache-t-elle une volonté de manipuler? En deux jours à peine, Philip change radicalement d'avis sur l'Italienne et tombe rapidement sous son charme. L'auteur nous immerge dans son ressenti et une fois de plus, peint les émotions de manière très juste. Peu habitué à la compagnie des femmes à part celle de Louise son amie d'enfance, le jeune homme se découvre des sentiments inconnus jusque là, tandis que le lecteur soupçonne quelque manigance de la part de l'héroïne concernant l'héritage qu'elle n'a pas eu de son défunt mari... Il est si facile à enjôler cet innocent Philip, avec un sourire, un geste, un mot savamment dosés!

 

Peu à peu un malaise s'installe dans le couple, entre les variations d'humeur de Rachel allant dans le sens de la duplicité, sa célèbre "science des herbes" alors même qu'Ambroise affirmait avoir été empoisonné; l'amour plein et entier que lui voue Philip, empreint néanmoins de jalousie - ne s'intéresse-t-elle à lui qu'à cause de sa ressemblance avec son cousin? N'éprouve-t-elle pas des sentiments pour son conseiller de toujours, Rainaldi? Lui semble très attaché à elle... Ne serait-il pas celui qui tire les ficelles dans l'ombre? Alors même que Rachel à la personnalité double (et trouble) semble une coupable toute désignée, de nouveaux éléments distillés sur la fin sème à nouveau le doute sur ses intentions et sentiments. Y a-t-il eu "tromperie dès le premier jour" comme le soutient Louise? Rachel ne serait-elle pas plus fragile qu'on ne le croit? Daphné du Maurier laisse la question en suspens jusqu'au bout, et la fin laisse le lecteur perplexe... mais charmé par cette histoire d'amour tourmentée si bien menée.

Patricia Deschamps, janvier 2020

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