Le monde dans leurs yeux

manga d'Ebine YAMAJI

Les filles doivent être comme ci, et pas comme ça... Gnagnagna... (p.52)

Alpha, 2024, 200 p.
Alpha, 2024, 200 p.

Ebine Yamaji nous emmène aux quatre coins du monde rencontrer des jeunes filles à la découverte de leur condition et leur destin. L'occasion d'observer les sociétés patriarcales dans laquelle elles vivent. D'une jeune fille qui découvre que son père a plusieurs femmes en Arabie Saoudite, à la peur de ne pas trouver de mari dès le plus jeune âge au Maroc, jusqu'à la condition des femmes au Japon, ce livre témoigne des points communs de la société patriarcale à l'international et de son impact sur les jeunes filles.

Mon avis :

C'est un manga grand format très agréable à lire. Le graphisme est sobre mais il aborde la condition féminine dans le monde de manière frappante, à travers le regard de fillettes de dix ans.

 

On commence avec l'Arabie Saoudite où, même si les femmes ont "enfin le droit de conduire", se pratiquent toujours les mariages arrangés ("Ma mère dit qu'il faut absolument s'en occuper avant l'âge nubile")... sachant que l'union peut être annulée si la promise ne plaît pas à l'homme le jour où il la voit pour la première fois!

Dans ce pays arriéré, garçons et filles ne vont pas à la même école. La petite Salma doit porter le voile quand elle sort et ne peut pas participer à des activités avec des hommes extérieurs à sa famille.

Pour elle, le choc sera d'apprendre la polygamie de son père: "Est-il possible de vivre sans se marier?", se demande-t-elle alors. La solution est peut-être de partir étudier à l'étranger afin "d'élargir mon champ de vision".

 

Pour Shama la vieille Marocaine, "ce qui est déterminant pour une fille, c'est son physique. Ses bons résultats scolaires n'inspireront que du mépris aux hommes". Comme dans la première histoire, l'héroïne s'insurge: "Comment elle peut dire des trucs pareils à notre époque?". En réalité, la vieille femme a mené une vie sans aucun plaisir, d'où son caractère aigri. Habiba refuse de subir la même condition: elle aime trop l'école et les livres!

 

Avec l'histoire de Kanti, on comprend l'importance de l'argent en Inde: "Une femme sans formation scolaire ni homme pour la soutenir ne peut rien faire...". C'est le cas de la jeune femme qui lui fait des leçons à la maison. Sauf qu'il n'y a pas qu'aux enfants que celle-ci donne des "cours particuliers"... Et la mère de Kanti est trop soulagée d'avoir trouvé un homme ayant accepté d'épouser une veuve pour oser protester contre les agissements de son nouveau mari. Mais Kanti, elle, est révoltée par le comportement de son "papa protecteur".

 

Même au Japon, le sexisme perdure! Selon la grand-mère de Marié, "dans la vie, quand une femme est plus douée qu'un homme, elle rencontre toutes sortes de problèmes". Par ailleurs, "une fille qui se fiche de la mode et de la beauté, c'est problématique. Elle aura beau être brillante, une fille terne sera malheureuse"! Heureusement, la fillette a un bel exemple de féminisme avec sa mère: "Ce n'est pas aux autres de décider ce qui me procure ou non du bonheur". Après tout, "être heureux, ça consiste à se sentir satisfait avec ce qu'on possède et ce qu'on peut faire".

 

On termine avec Mursal la petite Afghane. Le départ des Talibans en 2002 a été un soulagement pour les filles ("Des filles de tous les âges venaient à l'école pour la première fois"). En 2021, voilà les extrémistes de retour dans le pays... Mais maintenant, les filles connaissent la valeur de la liberté et elles ne comptent plus se laisser faire!

 

J'ai trouvé que c'était un beau message final, qui résumait bien l'esprit du manga: les nouvelles générations sont prêtes à se battre contre le patriarcat, et pour leurs droits!

Patricia Deschamps, mai 2025

égalité hommes/femmes
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