Killer game

thriller de Stephanie PERKINS

J'imagine qu'on ne sait jamais vraiment ce qui se passe dans la tête des autres.

Gallimard jeunesse, 2019, 387 p.
Gallimard jeunesse, 2019, 387 p.

Osborne, petite ville tranquille du Nebraska où il ne se passe jamais rien. L'endroit idéal pour exiler sa fille qui a commis un geste impardonnable et s'est fait expulser de son ancien lycée... C'est ainsi que Manaki a dû quitter Hawaï pour venir y habiter avec Grand-Mère Young.

 

Mais voilà que des élèves se font assassiner les uns après les autres. Haley a été tuée chez elle et Matt dans les vestiaires. Tous deux étaient populaires, l'une en tant qu'actrice du club théâtre et l'autre en tant que joueur de football américain.

 

Alors quand les policiers débarquent pour interroger les élèves, Manaki prend peur: non pas d'être la prochaine victime, mais qu'ils fouillent dans son dossier...

 

Mon avis :

Un thriller atypique qui adopte le point de vue des victimes.

Malgré un premier meurtre d'entrée de jeu, l'intrigue peine à se mettre en place. L'ambiance est morose parce que la petite ville d'Osborne l'est, les adultes résignés à y passer une vie étriquée et monotone, les jeunes rêvant sans grand espoir de partir un jour. L'héroïne, Manaki, y est en exil malgré elle ("Elle était prisonnière de cette ville horrible où elle détestait tout et tout le monde. Surtout elle-même.") depuis qu'un mystérieux "geste impardonnable" l'a obligée à changer de résidence et de nom. Le secret la ronge, tout comme sa relation avortée avec Ollie le solitaire. La première partie, centrée sur la jeune fille avec qui on fait lentement connaissance, m'a semblé un peu longue.

 

Mais petit à petit on s'immerge dans ce roman à l'atmosphère tangible (un peu comme celle de Qui a tué Herman Henderson?), d'autant plus que les personnages ont des personnalités fortes, à l'image des deux meilleurs (seuls?) amis de Manaki, Darby le transgenre et Alex la gothique. Le récit gagne en tension au fur et à mesure que les meurtres se multiplient, car on ne suit absolument pas l'enquête (même si le frère policier d'Ollie, Chris, livre quelques éléments), restant du côté des cibles potentielles du psychopathe. Qui sera la prochaine victime parmi les lycéens? Quel est le lien entre eux tous? Le coupable est dévoilé bien avant la fin (nouvelle originalité) et pourtant la tension persiste: encore faut-il l'arrêter!

 

Le drame va évidemment bouleverser cette ville tranquille, y compris dans le bon sens puisque la petite communauté va resserrer ses liens dans l'adversité ("Les barrières sociales se brisaient partout."). Une aubaine pour Makani l'étrangère à "la peau brune" (elle est hawaïenne), qui par ailleurs se rapproche de cette grand-mère qui n'a pas vraiment eu le choix de l'héberger. Elle qui était une charge pour sa mère ("Trois minutes quatorze secondes. Elle avait failli être tuée, et sa mère lui avait royalement accordé trois minutes quatorze secondes.") découvre le bonheur de se sentir aimée, et même si la tragédie se termine un peu excessivement en bain de sang, l'adolescente nous aura touchés au travers d'une histoire se distinguant du genre.

Patricia Deschamps, novembre 2019


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