Histoires pressées

de Bernard FRIOT

On n'a jamais vu ça dans les histoires.

Milan poche, 2007, 108 p.
Milan poche, 2007, 108 p.

 

Histoires pressées, ce sont des histoires courtes à déguster à table entre deux bouchées, à l'école dans la cour de récré, ou ailleurs si ça nous chante. Histoires à terminer, à raccommoder, à détruire en mille morceaux. Juste le temps d'un sourire, d'un frisson ou d'une émotion

Il arrive tant de choses bizarres dans la vie quand on sait comment la regarder!

 

(Texte : 4e de couverture)

Mon avis :

Dans mon collège, les petits textes de Bernard Friot servent d'entraînement aux élèves de 6e en remédiation lecture et c'est bien souvent le premier livre qu'ils empruntent ! Cependant je n'ai retrouvé que "Exercices", les autres extraits doivent provenir d'un autre recueil.

 

Dans ces mini-histoires de deux-trois pages, l'auteur s'amuse avec les mots et avec son lecteur. Si certains récits sont "simplement" drôles (j'ai adoré l'élève qui, excédé par les "SILENCE !" répétés de sa maîtresse finit par lui lancer à son tour : "Taisez-vous et laissez-nous travailler !"), beaucoup jouent franchement avec l'absurde. Ainsi, il arrive que les objets prennent vie, comme ce gros dictionnaire rouge vexé qui s'abat sur son voisin le petit roman. Ou cette recette de compote racontée du point de vue de la pauvre pomme. L'enquête évoquée par le cheveu ("Surtout ne me touchez pas : je suis un indice !"). Quand les animaux du reportage sortent de la télé, on se demande où s'arrête la réalité et où commence l'imagination ! Et ces phrases qui sortent littéralement des livres, donnant vie aux histoires, "c'est incroyable !"... Bernard Friot bousculent les codes ("Il y a des chances pour que ça se termine mal, ce serait beaucoup plus drôle, non ?"), brise les attendus (que faire dans un conte quand le roi a disparu, que la princesse ne répond pas, que le dragon a fichu le camp et que le chevalier n'est pas d'accord ?!) et propose des chutes inhabituelles (dans la sorcière amoureuse, telle est prise qui croyait prendre !).

 

Cependant les sujets savent aussi être sérieux. Dans "Il ou elle", il est question d'identité. Dans "Compte" et dans "Cauchemar", très touchantes, l'auteur évoque les relations parfois difficiles entre mère et enfant. Tout n'est pas gai, comme en témoigne le jeune héros de "Fer à repasser", transformé malgré lui alors qu'il rendait un service... Les textes s'enchaînent sous des formes très variées (récits, monologues et même une saynète de théâtre) et provoquent des émotions très diverses ("La chose", sous le lit, est bien angoissante). On sent tout l'amour de l'auteur pour la langue française dont il nous fait partager la richesse, et son plaisir à affabuler à partir de petites situations de la vie quotidienne. Des histoires à lire, pour soi ou à voix haute, et à s'inspirer pour des travaux d'écriture !

 

Patricia Deschamps, octobre 2017


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