Cicatrices de guerre(s)

Collectif

22 auteurs de bande dessinée se penchent sur la Première Guerre mondiale, en partenariat avec l'Historial de la Grande Guerre à Péronne (Somme).

Ed. de la Gouttière, 2010, 96 p.
Ed. de la Gouttière, 2010, 96 p.

Fiers comme les moustaches qu'ils arboraient, les Poilus sont partis au combat avec la farouche volonté d'en découdre (Les moustaches). Mais très vite, les blessés et les morts qui s'accumulent (Fragments), le rouge du sang dans les tranchées qui se répand jusqu'à tout recouvrir (Rouge festin), ont eu raison de leur détermination... Quand les photos ne suffisent plus à se souvenir de qui on était avant, c'est l'esprit qui se meurt... Regardez ces gueules cassées : de vraies têtes de passoire ! (Chanson pour Vernon). Si seulement il existait "une potion qui ferait qu'on serait jamais mort" !..(Jeux de guerre).

Parfois la guerre peut se faire oublier un instant, lorsqu'un bleu innocent fait preuve de petites attentions (Bleuet), ou lorsqu'un père plein d'imagination embellit son quotidien dans ses lettres à sa fille (Les jours pluvieux). Mais la mutinerie n'est jamais loin : "Nous ne supportons plus de nous exposer vainement pour satisfaire les rêves de gloire de généraux imbéciles" (L'exemple)... Français, Allemands, au bout du compte "l'autre c'est aussi soi" : tous les soldats vivent la même horreur (Innocence). L'armée du Reich n'a-t-elle pas conclu un accord avec les "obus Letailleur", cette manufacture de Lorraine qui produit pour eux ?! (Les assis).

Oui, quel que soit l'uniforme porté, tous ont été des victimes...(Les croix de bois) Et les survivants resteront toute leur vie hantés par cette Grande Guerre (Soldat Swolf), comme ce grand-père qui racontent ses souvenirs inlassablement (Le quart). Car pour tous, la plus grande des craintes, c'est de tomber dans l'oubli...

Mon avis :

"Bleuet" de Denis Lachaussée et Aude Soleilhac p.15
"Bleuet" de Denis Lachaussée et Aude Soleilhac p.15

Quinze courts récits dans lesquels des auteurs et illustrateurs livrent leur vision personnelle de la Première Guerre mondiale. Le résultat est très hétéroclite, en couleur ou en noir et blanc, avec ou sans paroles, images sombres ou émouvantes. Chaque histoire est introduite par une photo d'époque et la citation d'un auteur célèbre, notamment d'authentiques témoins du conflit comme Henri Barbusse (Le feu), Blaise Cendrars (La main coupée) ou encore Roland Dorgelès (Les croix de bois).

Chacun, à sa manière, nous fait ressentir des émotions, de la peur à la fureur, de l'espoir à la résignation, de la souffrance à la détresse. C'est touchant et horrible à la fois, ça remue et ça perturbe - mais n'est-ce pas là l'objectif ? Nous faire réaliser, malgré le siècle passé, que tout est véritablement arrivé, et qu'il est de notre devoir de ne pas l'oublier... Car "il restera bien un par qui la mémoire durera", afin d'éviter que ces Poilus qui se sont tant battus, ne meurent une seconde fois.

Patricia Deschamps, octobre 2015

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