Caméléon : Les filles Asperger déboulent !

de Christine DEROIN et Gilles MARTINEZ

C'est quoi la normalité ? Faut-il être toujours dans la normalité ?

Le Muscadier, 2020, 88 p. (Saison psy)
Le Muscadier, 2020, 88 p. (Saison psy)

 

Alice est une adolescente que tout le monde a toujours qualifiée de haut-potentiel sans reconnaître la profondeur de son malaise et son véritable trouble Asperger. Un déménagement et un changement de collège vont la déstabiliser et faire jaillir sa personnalité d’ovni (« objet vivant non intégré »), comme l’appelle sa sœur. Son admiration pour Fanny, la star de la classe, et sa volonté de lui ressembler en tout point pour être aimée, vont faire exploser ses repères et la mettre en danger.

 

(4e de couverture)

Mon avis :

Le titre est mal choisi (on ne comprend pas, dans un premier temps, le rapport entre "caméléon" et le champignon de la couverture, et puis il n'y a pas, dans l'histoire, "des" filles Asperger mais bien une seule...), cependant ce quatrième livre de la collection "Saison psy" que je découvre est tout aussi instructif que les précédents.

 

La partie narrative est un dialogue entre la sœur d'Alice l'autiste et un·e camarade (Nicolas?). Il semble y avoir eu un drame et ils tentent de comprendre comment la situation en est arrivée là. La sœur explique la personnalité d'Alice, ses particularités. Elle souhaite préparer un exposé sur la discrimination car pour elle, c'est bien de cela qu'est victime Alice.

 

"Il y avait ses champignons, sa solitude, ses amis imaginaires". Alice a d'excellents résultats scolaires qui rendent fiers ses parents ("Ils la croyaient surdouée") mais sa différence ne fait aucun doute. La partie documentaire ("le mot du psy") précise les traits communs à toutes les formes d'autisme : la solitude (recherchée ou subie), les troubles de la communication verbale et non verbale (pas de compréhension du second degré, expression "cash", difficulté à identifier les émotions y compris les siennes) et une tendance à préférer ce qui ne change pas. Le "syndrome Asperger" se distingue par l'absence de retard mental.

 

C'est peut-être pour cela qu'Alice comprend que pour être aimée, il faut être jolie et populaire comme Fanny, à qui elle va chercher à ressembler, tel un caméléon, donc (en vain). L'obsession va jusqu'à imiter ses gestes et mimiques en un mimétisme "flippant". Car pour les autistes, la cognition sociale n'a rien d'évident ("la ressemblance était ratée") et ils n'en comprennent pas la subtilité (c'est d'ailleurs pour cela qu'ils apprécient les mangas: les expressions y sont caricaturales).

 

Avec Lucas, cela devient carrément "l'enfer": Alice le prend, à tort, pour son alter ego. Dès lors la situation dégénère, l'adolescente est de plus en plus rejetée, moquée, insultée et même agressée... jusqu'à la catastrophe. On sent la sœur d'Alice tiraillée: elle comprend que celle-ci puisse exaspérer, et en même temps elle souffre de voir les répercussions de ce rejet. Répercussions qui iront en s'aggravant avec le temps (stress permanent, isolement, TOC, dépression...).

 

Dès lors, une seule solution, comme pour tout·e handicap et maladie: poser un diagnostic (il est souvent moins fait chez les filles, pour différentes raisons) et organiser une prise en charge ("Elle aurait dû être accompagnée"). Rentrer dans le moule, être comme les autres, est impossible et inutile: il faut soigner les concernés... et informer les autres!

Patricia Deschamps, mars 2023


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